Quel bonheur de pouvoir prendre quelques vacances. Après un championnat d'Afrique frustrant (3e en raison d'un arrangement entre les Sud-africains et les nigérians dans le dernier match), j'avais bien besoin de couper. Direction le soleil. Téléphone coupé, les tracas de la vie quotidienne me semblent bien loin.
Retour en France après 2 semaines de repos, j'en profite pour rallumer mon téléphone et vérifier mes messages :
Message 1 : Coach, c'est Yousef. Pourquoi vous m'avez renvoyé chez les Espoirs ? Ils ont tous les mains carrées. Je ne veux pas jouer avec eux.
Message 2 : Coach, c'est Harawi. Dites, je n'ai pas encore reçu ma convocation pour le match contre la France, c'est normal ?
Message 3 : Coach, c'est encore Harawi. Je viens de discuter avec Mubarak et Bassini et eux non plus n'ont rien reçu.
Message 4 : Bonjour Coach, c'est El Abdel. Dites, je ne comprends pas, j'ai bien progressé et je n'ai pas eu de nouvelles pour le match contre la France.
Message 5 : Coach, c'est toujours Harawi. On commence à s'inquiéter. J'ai appelé les autres internationaux et personne n'a rien reçu pour le premier match de qualification contre la France. Qu'est-ce qu'on doit faire ?
Message 6 : Bon, coach, comme on n'a pas eu de nouvelles, on a décidé de s'organiser nous même pour ce déplacement. Appelez-nous dès que vous recevez ce message.
Message 7 : Bonjour, c'est Harawi. On a retrouvé un vieux schéma tactique qui traînait. Je ne sais pas si c'est ça que vous aviez prévu mais on va faire avec.
Message 8 : Bon, bah voilà, on vient de se prendre une raclée contre les Français. On espère que vous allez bien.
Aïe... La saison a déjà repris ? La trêve a été drôlement courte cette saison...
Égypte-Canada :Après mon escapade philippine, me revoilà face à mon groupe. J'adopte un profil bas après les avoir abandonné pendant ce match. Certains pensent même que j'ai saboté exprès cette rencontre en raison de mes origines. Pas un mot à l'entraînement, ni dans les vestiaires. Je sens bien qu'il y a un malaise.
Sur le terrain, les joueurs ne mettent aucune envie dans ce match. A l'arrivée une grosse défaite.
Après le match, j'ai une explication franche avec les joueurs. On a décidé de crever l'abcès. Maintenant que la qualification pour la Coupe du Monde est définitivement morte, notre objectif commun est de faire le meilleur parcours possible dans le tournoi de consolation.
Égypte-Malaisie :Dernier match des repêchages pour les Championnats du Monde. Avec 2 défaites, nous sommes d'ores et déjà éliminés.
Dans les vestiaires, je demande à mes joueurs de lever le pied car je n'ai pas envie de les voir blessés ou lessivés avant le tournoi de repêchage. Les joueurs ne semblent pas vraiment d'accord et voudraient au contraire tout donner pour sauver l'honneur et terminer ces repêchages avec au moins une victoire. Mais je me montre intransigeant. Je ne veux pas qu'ils gaspillent leur enthousiasme pour un match sans importance, sans compter que j'estime que les malaisiens nous sont bien supérieurs.
Au final, dans une ambiance surchauffée et avec des malaisiens morts de faim, mes joueurs s'inclinent en prolongation. Zéro victoire au compteur donc mais un enthousiasme que j'estime au plus haut pour mes joueurs.
Égypte-Pakistan :Premier match du tournoi de consolation. La mauvaise surprise avant ce match est de voir le peu d'enthousiasme de mes joueurs. Apparemment, la défaite contre la Malaisie les a plus atteint que je ne le pensais.
Pour ce match importissime contre une équipe à notre portée, je sélectionne les joueurs plus en forme afin d'assurer la victoire.
Arrivés à l'aéroport international de Karachi, nous partons nous isoler dans notre hôtel. Nous sentons que la pression est importante pour ce match, des deux côtés.
Dans les vestiaires, avant le match, je sens que mes joueurs ont une petite boule dans la gorge. Une victoire nous permettrait de se remettre sur les rails. Mais l'ambiance est survoltée dans la salle. C'est sous les huées de la foule que les joueurs font leur entrée sur le terrain. Nous n'attendons plus que l'entrée de nos adversaires. Mais rien ne se passe. La foule commence à se calmer. Tout le monde semble interloqué. Est-ce une manoeuvre tactique de la part de notre adversaire pour nous déstabiliser. En tout cas, je sens bien que c'est en train de fonctionner. Mes joueurs commencent à devenir livides. Attendre comme ça au milieu du terrain dans une salle hostile, sans vraiment savoir ce qu'il se passe.
Sentant qu'il faut faire quelque chose, je m'approche des officiels et commence à leur mettre la pression. Mais une rumeur commence à enfler. Le sélectionneur aurait été démis de ses fonctions suite à des magouilles pour se faire élire. Aucun joueur n'ayant été convoqué pour ce match, ce sont donc des spectateurs tirés au hasard qui joueront contre nous.
Une victoire nette et sans bavure qui nous permet de renouer avec la victoire.
Le match suivant est enfin un match à domicile. Mais les joueurs, probablement encore la tête à leur démonstration contre les amateurs pakistanais n'ont pas l'air très concentrés par cette rencontre contrairement à leurs adversaires. De plus, obnubilé par la carrure des intérieurs adverses, j'avais décidé de renforcer ma raquette. Mal m'en a pris car les extérieurs adverses se sont régalés face à ma défense gruyère avec respectivement 29 et 25 points. C'est même miraculeux que nous ayons été encore dans la course à quelques minutes du coup de sifflet final.
Bref, un match à oublier...
Pour ce match encore, nous avons l'avantage du terrain, et contre un adversaire à notre portée qui plus est. Le Maroc s'étant qualifié pour les Championnats du Monde à la surprise générale, nous savons qu'une victoire nous consacrerait quasiment à coup sûr meilleure nation africaine de ce tournoi de repêchage. Ce n'est pas qu'un titre honorifique car la fédération internationale a décrété que cela serait un critère décisif quant à l'attribution des prochains championnats d'Afrique. Et comme j'ai envie d'offrir cela en cadeau d'adieu aux Egyptiens, je passe ma semaine à organiser les schémas tactiques pour ce match.
Bon, pour être honnête, de match, il n'y eut point. Gonflés à bloc, mes joueurs ont surclassé leurs adversaires d'entrée de jeu pour leur infliger un 30-18 dans le premier quart-temps duquel ils ne se relèveront pas.
A l'issue de cette rencontre, l'un des émirs me demanda même si je ne voulais pas venir prendre en main l'une des équipes locales mais, malgré l'attrait de la valise de pétro-dollars qu'il me proposait, je suis trop attaché à l'Olympus Team et, avec sa tignasse rousse, la peau de Nicolas Saint-Martin ne supporterait pas le soleil du golfe Persique (et je n'oserais même pas imaginer ne pas l'avoir dans mon équipe).
Déplacement dans les Pyrénées pour ce match contre une petite nation au niveau géographique, mais l'air des montagnes semble bénéfique à leurs joueurs.
D'ailleurs, cet air trop pur m'est un peu monté à la tête car je me décidais, je ne sais pourquoi à obliger les joueurs à défendre à l'intérieur. Peut-être la peur que l'une de ces impressionnantes montagnes rentre sur le terrain ?
Et puis, jouer en altitude, lorsqu'on n'en a pas l'habitude, on s'essouffle rapidement.
Dommage que le match n'ait pas eu lieu chez nous, au niveau de la mer, en plein désert et sous le soleil. Le résultat en aurait été à coup sûr différent.